Mes frères

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Aujourd’hui, j’ai regardé mes frères un peu plus intensément que les autres jours. J’ai regardé le premier et j’ai vu ses rides. De petites lignes bien marquées partant du coin extérieur de ses yeux. J’ai regardé mon deuxième frère et je l’ai vu, l’air fatigué, appuyé sur sa chaise. Tous deux indépendants, tous deux fiers de l’être, tous deux endurcis par le travail, tous deux fatigués de leur journée et bientôt épuisés de leur semaine.

Je les ai regardés, admirés, écoutés, appréciés, comme à chaque fois que je les vois. J’aime les voir, leur parler, leur demander conseil, me confier à eux et chercher du réconfort auprès d’eux. Je les aime tout simplement.

Pourtant aujourd’hui, je les ai vu différemment, plus fatigués, plus préoccupés, avec des signes qui ne trompent pas, signifiant que la vieillesse était là. Et ça m’a fait un choc.

13 années et quelques mois me séparent d’eux deux, donc la différence est là et ça ne devrait pas me choquer. Mais je les ai vus, marqués par le temps et les épreuves de la vie. Depuis toujours, je les respecte et les envie de par leur manière de faire, de travailler, de bricoler, de se débrouiller pour tout faire avec quasiment rien et de par leur puits de connaissances qui me paraît jusqu’à ce jour, infini. 

Ils m’impressionnent chaque jour un peu plus. Ils se dépassent et se surpassent sans arrêt. Mais, j’ai peur qu’un jour leur corps les abandonne. En gros que leur corps lâche et qu’ils ne puissent rien y faire. Que l’un deux se casse quelque chose, ou soit atteint d’une maladie plus grave, dû au travail acharné qu’ils exercent.

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J’ai peur de les voir s’éteindre tout doucement. Pour l’instant je les vois, vieillis. Pour chacun de mes frères, son corps le fait souffrir, d’une manière ou d’une autre. Les jambes, le dos, le cœur, plusieurs parties du corps commencent à se manifester, mais pas dans le bon sens. Doivent-ils se calmer, ralentir, se reposer un peu ?

Oui sûrement, mais ils n’ont pas été élevés ainsi. On ne ralentit pas, on ne réduit pas ses efforts, on continue encore et toujours plus. On fait son maximum pour atteindre les objectifs fixés et si on sait faire plus, on le fait, bien sûr. Leur esprit d’indépendant et de Fauconnier a pris le dessus depuis bien longtemps. Ils sont durs, solides et dignes de confiance.

Ils agissent dans l’intérêt d’autrui, pour que le travail soit fait, accompli, réalisé de A à Z avec le plus grand soin, et surtout pour que cela plaise aux clients.

Ça arrive quelques fois qu’ils s’accordent une pause, c’est rare mais ça arrive. Ces pauses se traduisent par des soupers au restaurant, voir des amis, boire un verre ou encore souper en famille. Rien de plus extravagant ni de plus long que ça. Cela ne doit pas durer trop longtemps car ils n’aiment pas rester inactif et surtout, le temps c’est de l’argent.

Quelques fois, je prends part à ces petites pauses, je les vois alors se détendre un peu.

Lorsque leur visage est marqué d’un sourire, c’est pour moi la plus belle des visions, je ne peux qu’apprécier, leur rendre leur sourire et me réjouir de les voir heureux, rien que l’espace d’un instant. La vie se montre parfois tellement dure envers eux. Leur métier est dur, risqué, quelques fois pénible mais bien souvent gratifiant. Ils sont fiers de travailler comme ils le font et d’être remerciés par la grande satisfaction des clients.

Mes frères, je les vois souvent, et j’ai beaucoup de chance de les avoir. Au plus je les regarde, au plus je vois la vieillesse les accueillir à bras ouverts. Et ça me fait quelque chose, l’émotion me gagne à chaque fois. Car je ne fais pas attention aux années qui passent, aux gens qui évoluent et aux situations qui changent.

Pour moi, je suis toujours la petite fille qui les embêtait à vouloir jouer avec eux, à les chatouiller, à rigoler, je suis toujours leur petite sœur. Et ce sont toujours mes grands frères, pleins d’énergie, qui me faisaient des farces, qui jouaient avec moi et qui rigolaient de mes grimaces ou de mes chutes. Mais le temps ne s’arrête pas, il file entre nos doigts. Et tout ce que l’on peut faire, c’est en profiter pleinement, sans jamais regretter un seul instant. 

Catégories : Réflexion. Étiquettes : corps, fatigue, frères, réflexion, et travail.